Les émissions de GES en France : la situation (1/2)

À des fins personnelles, j’ai désiré faire le point sur la situation de la France en termes d’émissions de gaz à effet de serre et de politique climatique. Dans une série de deux articles, je partage ce tour d’horizon qui permet d’avoir en tête l’ensemble des éléments clés sur le sujet. J’ai essayé de répondre à quelques questions fondamendales : Quelle responsabilité historique ? Quel poids dans les émissions mondiales ? Quelle est la part des différents secteurs économiques dans les émissions ? Et enfin, quelles évolutions passées et futures ?

Dans ce premier article, j’expose les chiffres-clés des émissions de GES en France et je m’attarde sur les évolutions depuis 1990.

Une responsabilité historique élevée mais un impact potentiel limité

Dans cette première partie, je reviens sur la responsabilité historique de la France. C’est un aspect important : du rôle historique des pays développés dans le changement climatique découle leur devoir actuel de mener la transition écologique.

Responsabilité historique importante

La France est responsable d’environ 2,26% des émissions de GES depuis la révolution industrielle. On peut essayer d’en déduire sa responsabilité dans le changement climatique en comparant ce chiffre à celui de la proportion de Français dans la population mondiale. Cette méthode est imparfaite car simpliste, mais elle a le mérite de donner rapidement une idée approximative des bénéfices tirés par un pays de ses émissions pour se développer.
Aujourd’hui, les Français représentent environ 0,89% de la population mondiale. Cela signifie que nous avons bénéficié des émissions de GES pour notre croissance de manière plus que proportionnelle. Par exemple, la Chine a certes contribué historiquement pour 11,81% des émissions mondiales, mais les Chinois représentent aujourd’hui plus de 18% de la population mondiale.

Impact potentiel limité

En 2016, les émissions françaises de gaz à effet de serre représentent un peu moins de 1% des émissions de GES mondiales. En prenant en compte l’empreinte carbone, c’est-à-dire en ajoutant les émissions importées nettes et une partie des émissions liées au transport international, ce total monte à 1,57%. La France, seule, n’a donc qu’un impact très marginal sur les émissions mondiales de GES. Quelques soient les efforts faits au niveau national, ils n’auront presque aucune incidence sur le changement climatique.

Ainsi, si la France doit mettre en place une politique climatique ambitieuse, ce n’est pas tant pour limiter son incidence personnelle sur le changement climatique, que de part sa responsabilité historique. En assumant cette responsabilité historique, et en se positionnant en leader, la France doit essayer d’entraîner le plus de pays possibles, à commencer par l’Union Européenne, dont les émissions représentent 9,22% des émissions mondiales en 2016.

Les émissions par secteur

Sur ce graphique détaillé, il faut noter que les 6 premières colonnes correspondent aux émissions nationales. La colonne “Hors-total” correspond essentiellement aux émissions liées au transport international (dont le transport aérien représente environ 75%), enfin la dernière colonne “UTCATF” correspond à l’évolution des puits de carbones. Cette évolution est liée aux changements d’utilisation des sols et à l’évolution de la surface forestière.

Les émissions par gaz

Ce graphique présente les émissions de GES par gaz. Les différents gaz sont comparés en fonction de leur pouvoir de réchauffement global et rapportés à un équivalent CO2.

Le dioxyde de carbone (CO2) est le principal contributeur à l’effet de serre. Ses émissions proviennent de la combustion d’énergies fossiles, notamment dans les transports ou la production d’électricité.

Le méthane (CH4) est la seconde source de GES résultant de l’activité humaine. Les émissions de méthane sont principalement liées à l’élevage de ruminants.

Le contributeur suivant est le protoxyde d’azote (N2O). Ce gaz provient de la culture et de l’épendage de lisier et d’engrais.

Finalement, les hydrofluorocarbures (HFC) contribuent pour 4,6% des émissions de GES françaises. Ces gaz sont utilisés comme réfrigérants dans les climatiseurs et réfrigérateurs, et comme agents de propulsion dans les aérosols.

Evolution des émissions depuis 1990

Ces deux graphiques présentent respectivement l’évolution absolue et relative des émissions nationales de GES par secteur. On observe ainsi une baisse d’environ 17% des émissions de GES en France depuis 1990 (19% en prenant en compte l’évolution des puits de carbone).

Deux secteurs ont notablement réduit leurs émissions : l’industrie et la transformation d’énergie.
La baisse des émissions liées à l’industrie est notamment causée par la désindustrialisation de l’économie française. Cela signifie que ces émissions ne contribuent plus au total des émissions nationales mais sont transférées dans l’empreinte écologique de la France sous la forme d’émissions importées.
Les émissions liées à la transformation d’énergie ont diminué du fait d’une baisse de l’activité de rafinage et de la fermeture de centrales au charbon et au fioul.

Les émissions liées au transport sont les seules à avoir augmentées sur la période du fait de l’accroissement du nombre de voitures individuelles et de la baisse du nombre de passager moyen dans les voitures.

Cette diminution d’un cinquième des émissions nationales ne compense pas la hausse des émissions importées. Les émissions importées ont augmenté de 50% entre 1995 et 2015 et ont dépassé les émissions domestiques (hors exportation) en 2010. Ainsi entre 1995 et 2015, l’empreinte carbone des Français a augmenté de 50%.4

Après ce point sur les émissions de gaz à effet de serre en France, pour découvrir la politique climatique française, ses objectifs et ses outils, je vous invite à continuer votre lecture avec cet article sur la stratégie nationale bas carbone.

Notes et bibliographie

1 : “Gütschow, J.; Jeffery, L.; Gieseke, R. (2019): The PRIMAP-hist national historical emissions time series (1850-2016). v2.0. GFZ Data Services. https://doi.org/10.5880/pik.2019.001
2 : Emissions importées nettes : émissions liés à la production des produits importés moins émissions des produits exportés. En 2015, en France, elle atteignent 50% des émissions nationales.
3 : CITEPA, mai 2019 - Format SECTEN
4 : Haut Conseil pour le Climat (2019) : Rapport annuel Neutralité Carbone

Avatar
Alexis Konarski
Consultant Développement Durable

Passionné et préoccupé par les enjeux du développement durable je partage sur ce site quelques articles sur le sujet.

Sur le même sujet